Bertrand Ollivier, « La MINUSMA : de puissance médiatrice à mission d’appui, itinéraire d’un mandat hasardeux», Le Rubicon, 12 mai 2023.

  • Dans cet article publié sur le site Le RubiconBertrand Ollivier, chercheur associé à l’Observatoire Boutros-Ghali, fait le bilan de l’évolution du mandat de la MINUSMA à l’heure où celui-ci va être renégocié selon l’une des trois options présentées dans le rapport interne (S/2023/36) du Secrétaire Général du 16 janvier 2023. Afin d’éviter que la mission ne devienne un simple soutien logistique et matériel aux autorités maliennes, l’auteur réaffirme l’importance des quatre conditions à la perpétuation de la mission, présentées dans le dernier rapport (S/2023/236) du Secrétaire général. Ainsi selon lui il est nécessaire :
      • Que la transition politique continue d’avancer,
      • Que des progrès soient effectués dans l’accord de paix,
      • Que la liberté de circulation de la mission soit garantie par les autorités maliennes, et ce même pour des opérations de surveillance ou de reconnaissance,
      • Que la mission puisse s’occuper de l’intégralité de son mandat, et même des droits humains Selon l’auteur, depuis 2015, la mission ne fait que s’adapter aux évolutions sur le terrain. Dés l’institution du mandat de la MINUSMA en 2013 via la résolution 2100 (S/RES/2100) le terrain est déjà peu favorable au déploiement d’une mission puisqu’aucun cessez-le-feu n’est mis en place à l’époque. Toutefois, en 2013, la MINUSMA est encore bien perçue par l’État malien. Le chef de la mission, Bert Koenders prend une place centrale dans les négociations à Ouagadougou. Pourtant, en 2014, le contexte change et l’État malien commence à percevoir l’ONU comme partiale. Les négociations sont relocalisées à Alger, et la MINUSMA se retrouve avec un simple rôle d’appui technique. En 2016, la résolution 2295 (S/RES/2295) affirme que la mise en œuvre de l’Accord devient la priorité stratégique de la mission. Elle s’en chargera alors à travers deux pressions, l’une militaire en appui aux opérations du G5 Sahel, et l’autre politique en établissant des sanctions sur certains individus bloquant le processus de paix. En 2019, la résolution 2480 (S/RES/2480) instaure une seconde priorité stratégique pour la MINUSMA : la protection des civils, ce qui mène à un redéploiement ainsi qu’à la mise en place d’unités plus mobiles. Ainsi, l’appui à l’Accord de paix est maintenant secondaire par rapport à la protection des civils et au renforcement de l’autorité étatique. L’auteur critique le fait que la mission suit de plus en plus les priorités des autorités maliennes. À l’heure actuelle, nombreux sont ceux qui remettent en question la légitimité de l’Accord pour la Paix et la Réconciliation. De plus, la MINUSMA a perdu la possibilité d’initiatives dans la mise en place de celui-ci. Néanmoins, l’auteur remarque que, malgré la lente perte d’influence de l’ONU au Mali, la mission a développé énormément de projets d’infrastructure et de développement.