La justice transitionnelle (JT) est aujourd’hui un enjeu majeur pour la consolidation de la paix dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC), et elle s’inscrit dans l’agenda onusien des opérations de paix et du processus de pacification de la RDC . Cette région reste marquée par un important climat d’insécurité malgré des reconfigurations de la scène politique nationale et un travail important de la MONUC puis MONUSCO pour la pacification de la région. Néanmoins, une approche de la pacification centrée sur l’intégration des ex-combattants dans l’armée et l’appareil d’État, des accords politiques et de partage des pouvoirs ne sont pas parvenus à produire la réconciliation des communautés impliquées dans ces conflits. Ce modèle basé sur des mécanismes d’intégration politique et de démobilisation n’a pas suffi à traiter les causes résiduelles des conflits intercommunautaires. C’est pourquoi une approche holistique à l’image de celle de la JT est préconisée puisqu’elle vise à combiner des mécanismes de répression à des mécanismes non judiciaires de réparation et de recherche de la vérité. Comme telle, elle devient un instrument de la réconciliation à même de s’attaquer aux racines sociales des conflits et aux causes socioéconomiques de l’enrôlement d’une partie de la jeunesse congolaise dans les groupes armés.
En quoi consiste la justice transitionnelle ? Pourquoi les autorités de Kinshasa veulent-elles la mettre en œuvre en RDC ? Quels sont ses apports spécifiques dans le cadre des objectifs de consolidation de la paix poursuivis par une opération de paix (OP) ?
Cette note revient sur le rôle des tribunaux communautaires comme mécanismes de la justice transitionnelle pour sortir du cycle des conflits résiduels et réussir la pacification à l’Est de la RDC en traitant les conflits territoriaux susceptibles de dégénérer en l’absence de cadres judiciaires adaptés. Elle aborde également le rôle limité des opérations de paix réduites à des actions d’informations en direction des acteurs impliqués dans ce processus judiciaire. Plus fondamentalement, cette note entend analyser d’abord la manière dont la JT apparaît comme un instrument adapté au traitement par le bas des conflits résiduels aux racines locales qui viennent alimenter les antagonismes armés intercommunautaires. Pour ce faire, elle pointe l’indispensable logique d’appropriation des mécanismes de justice transitionnelle.
Cette note a été réalisée grâce au soutien de la Confédération suisse.
Les opérations de paix et la justice transitionnelle : le rôle des mécanismes communautaires de pacification dans l’Est RDC
Dr Axel Augé est sociologue, docteur en sociologie politique et militaire et habilité à diriger des recherches (HC) à l’académie militaire de Saint-Cyr Coëtquidan (AMSCC), où il dirige l’Observatoire des forces morales au centre de recherches (CReC Saint-Cyr). Chercheur associé à l’Observatoire Boutros-Ghali du Groupe de recherche et d’information sur la paix (OBG-GRIP) à Bruxelles, il est l’auteur de plusieurs publications et communications sur les organisations et les acteurs impliqués dans le maintien de la paix et les armées en Afrique subsaharienne. Membre du Laboratoire interdisciplinaire et de recherche en innovations sociétales (LiRIS, EA 7481) à l’université de Rennes 2 en France, il mène ses travaux sur les soldat de la paix, les patriotismes, les organisations militaires et le psycho-traumatisme des personnels en uniforme.