Le 24 octobre est célébrée la « Journée des Nations unies ». Instaurée en 1947, puis devenue jour férié international en 1971, cette date marque l’entrée en vigueur de la Charte des Nations unies, le 24 octobre 1945, considérée comme l’acte de naissance de l’Organisation.
L’ONU fête donc ses 80 ans : huit décennies d’engagement pour la paix, les droits humains et la coopération entre ses États membres. Depuis la première mission de maintien de la paix en mai 1948, l’ONU a déployé plus de 70 opérations, dont 57 depuis 1988. L’Organisation a su montrer ses divers outils de résolution des conflits et de consolidation de la paix.
À l’approche de son 80ᵉ anniversaire cependant, l’ONU traverse l’une des périodes les plus critiques de son histoire. Bien que nécessaire, son rôle de garant du multilatéralisme est remis en question, et l’action de l’Organisation est fragilisée par une double crise, budgétaire et de légitimité, qui appelle à une refondation en profondeur.
Sur le plan financier, les Nations unies connaissent d’importantes difficultés, tout d’abord en raison des retards de paiement de plusieurs États membres, dont les États-Unis et la Chine principaux contributeurs (voir l’édito de la lettre d’information de juin 2025). De plus, la Congrès américain discute actuellement d’une importante coupe budgétaire. Ces deux éléments ont contraint le Secrétariat des Nations unies à adopter un plan d’austérité d’une ampleur inédite.
L’initiative ONU80 a ainsi été lancée en mars 2025 pour moderniser le fonctionnement de l’organisation (voir notre brève de mai 2025) et réduire les coûts. Elle s’inscrit dans la continuité de l’Agenda 2030, du Pacte pour l’avenir et du programme « Notre programme commun », censés redonner souffle et cohérence à la coopération internationale. Toutefois, les premières mesures d’ONU80, centrées sur la réduction des coûts, risquent paradoxalement d’affaiblir la capacité opérationnelle de l’ONU.
Le 8 octobre, devant la Cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires, le Secrétaire général des Nations unies, António Guterres, a en effet proposé de réduire l’enveloppe de fonctionnement de 3,7 à 3,2 milliards USD et de ramener les effectifs de 13 900 à 11 594 personnes. Cette contraction budgétaire menace directement la mise en œuvre des mandats des opérations de paix déployées puisque le Secrétaire général de l’ONU a demandé à toutes les missions d’identifier des réductions de dépenses équivalentes à 15 % de leur budget annuel. Cela se traduira par une baisse d’environ 25 % des effectifs militaires et civils. Ces coupes budgétaires auront forcément un impact sur le terrain selon le Département des opérations de paix (DOP) puisque les missions ne pourront plus remplir correctement leur mandat et cela entrainera inévitablement moins de patrouilles, moins de zones sûres pour les civils et un appui humanitaire limité.
Cette crise interne s’accompagne d’une contestation sérieuse du multilatéralisme et des missions de l’ONU. Le 22 septembre, l’Assemblée générale des Nations unies (AGNU) a reconnu que l’Organisation fêtait son anniversaire dans un contexte mondial tendu : multiplication des conflits armés, montée des inégalités et menaces existentielles. Le Conseil de sécurité des Nations unies (CSNU), paralysé par l’usage récurrent du veto de la part de ses membres permanents, illustre cette impasse. De nombreuses voix appellent à une réforme de sa composition, notamment pour mieux représenter les pays dits du Sud global, condition essentielle pour restaurer la légitimité, la crédibilité et la performance du système onusien.
Aujourd’hui, l’ONU se trouve à la croisée des chemins. À l’aube de ses 80 ans, des pistes de réforme concrètes se dessinent pour redonner à l’Organisation les moyens de s’adapter aux transformations du monde contemporain et de renouer avec l’élan qui avait présidé à sa création.
Lors de la réunion ministérielle sur le maintien de la paix, tenue à Berlin les 13 et 14 mai derniers (voir notre brève de mai 2025), António Guterres avait déjà souligné la nécessité d’une mobilisation accrue afin d’assurer la durabilité de l’institution et de renforcer la coopération entre les États membres. En signe d’espoir, de nombreux participants y avaient réaffirmé leur attachement aux valeurs et aux actions des Nations Unies à travers de nouveaux engagements.
Rédaction : Alexis CUDEY, assistant de recherche au GRIP et à l’Observatoire Boutros-Ghali (OBG)









